Qui nous sommes
Je suis, ou plutôt nous sommes, toute une galerie de personnages. Une guilde de différents avatars unis autour de leur objectif d’observation, d’analyse et d’action. Appelez-nous :
1. Maître Lupin : l’apprenti désireux de s’initier à l’auto-défense intellectuelle
2. Dr Igor : le professeur, garant des savoirs et de la connaissance
3. Mario le Martien : l’observateur neutre qui décrit sans préjugés
4. Lord Tesla : l’ingénieux cerveau dont émanent idées et théories
5. Capitaine Hannibal : le conquérant qui traduit en actions toutes ses ambitions
6. Loki : le mauvais esprit, impulsif, cynique et de mauvaise foi
7. La Plume : le poète au style affirmé, créateur d’émotions
1. Maître Lupin : les objectifs d’un apprenti
Président, porte-parole et représentant officiel de notre confrérie, je suis le maître des masques. Le véritable dé à facettes à la source de chacune de nos identités. L’anonymat me permet de louvoyer comme une ombre par les méandres d’une société anonyme. Nos déguisements carnavalesques autorisent toutes les transformations ; je puis changer de rôle et de figure comme il nous sied. Derrière mon loup, je fais ce qu’il me plaît.
Pur et innocent, coupe vide ne demandant qu’à être remplie, je suis le garant de notre quête commune : la connaissance et la compréhension des mécanismes de l’illusion. Je souhaite édifier et développer mes capacités d’auto-défense intellectuelle, pour ne plus être le jouet des manipulations. Je ne suis qu’une poignée d’argile demandant à être modelée, mais selon mes propres aspirations. Je suis Maître Lupin, parce que j’ai la volonté de devenir mon propre maître.
2. Dr Igor : les savoirs d’un professeur
Doktor Igor, notre dévoué professeur, est le digne descendant de la longue et belle lignée des Encyclopes. Cette race de créatures fantastiques aujourd’hui presque éteinte a donné au monde de doux ogres borgnes incapables de satisfaire leur appétit de connaissance. D’aucuns affirmeront que la Providence leur a conféré ni plus ni moins que ce dont ils avaient besoin : un œil unique, mais doué d’une grande acuité. Dans une perspective évolutionniste, cependant, on dira que l’un de leurs deux yeux primitifs s’est atrophié par manque d’utilisation : il était devenu inutile aux Encyclopes de voir en relief, puisqu’ils passaient l’essentiel de leur temps à se repaître de savoirs anciens gravés pour la postérité dans de volumineux grimoires.
Reclus dans une bibliothèque poussiéreuse au charme suranné, Igor se plaît ainsi à dévorer des collections entières d’œuvres de science, de livres d’histoire ou bien d’essais de philosophie, si possible en version originale. La diversité de ses centres d’intérêt, la variété de ses lectures, et enfin son ample mémoire, sont le gage d’une profonde érudition. A priori, il voit d’un bon œil toutes les sources de sagesse. Ouvert et curieux, il surveille l’émergence des nouvelles idées. Il veille. Il a l’œil.
Et de cet œil unique, il voit bien plus loin que nombre d’êtres vivants ou de machines aux mille fenêtres. D’ailleurs, ce tendre monstre à sang froid sait observer avec calme et détachement. Sollicité pour l’explication d’un phénomène, il se voudra exhaustif et rigoureux, cherchant toutes les causes et explications possibles, mobilisant toutes les théories dont il a connaissance. Il s’autorisera à rassembler et confronter les différents outils à sa disposition, à rapprocher des domaines d’étude différents pour établir des liens entre les idées. Bâtissant pierre à pierre une pyramide de savoirs, il reste néanmoins limité par son manque de contact avec la réalité : puits de science, il voit toutes les sources d’information d’un même œil, et ne peut soumettre à l’expérience l’ensemble de ses connaissances, pour en tester la validité ou même la pertinence.
Bref, il peut absorber quantité d’informations, puis nous les restituer sobrement, une fois digérées. Pédagogue, Dr Igor sera chargé de puiser à toutes les sources de connaissance, et de présenter dans un langage simple et clair ce qu’il aura compris. Dans son rôle de “Professeur Encyclope”, il nous permettra donc de tirer des enseignements utiles et de nous forger des idées fortes issues de divers domaines de recherche. Sage gardien des savoirs, il appréciera les atouts de chacun des outils ayant fait l’objet de son étude.
3. Mario le Martien : les observations d’un étranger
Il vient, littéralement, d’une autre planète. Ou disons d’un autre monde. Car il provient avant tout d’un livre du psychologue Eric Berne, What Do You Say After You Say Hello? (Que dites-vous après avoir dit bonjour ?).
Mario observe son environnement comme le visiteur extra-terrestre qu’il est, fraîchement débarqué sur une Terre aux mœurs étranges. Il a cette chance de ne pas avoir encore été pollué par une manière de penser et un mode de fonctionnement typiquement humains. Alien non aliéné, il n’a aucun a priori. Il décrit exactement ce qu’il voit, ni plus, ni moins. Ce qui rend son apport précieux dans l’analyse :
- des faits : il verra ce que les choses sont au lieu d’être aveuglé par ce qu’on lui dit qu’elles sont, ou ce qu’on voudrait lui faire croire qu’elles sont ;
- des actes : de même, il observera ce que les gens font, et quels sont les résultats de leurs actions, plutôt que ce qu’ils pensent ou disent qu’ils font. Il ne s’attachera pas aux intentions apparentes des acteurs, mais à l’effet rendu par leurs actes ;
- des paroles : au lieu de s’arrêter à ce que l’émetteur d’un message pense ou dit vouloir dire, ou ce qu’un observateur naïf croirait avoir compris, il s’attardera à la fois sur la signification littérale des formules employées, sur le sens réel des paroles proférées et sur ce que le receveur de la communication en aura retiré.
En réaction à ses observations, d’aucuns pourront se sentir blessés. S’il voit en noir et blanc, que les couleurs se mélangent ou pas, Mario n’a pas à mâcher ses mots ; ses déclarations sont directes, abruptes, frontales. Mais il ne faut pas lui en vouloir. Il n’est pas responsable des faiblesses de ceux qui ne peuvent accepter la vérité. Lui n’a ni ego ni passion. Factuel, il n’a nul intérêt pour les dogmes, les conventions ou les explications simplistes, toutes notions qui lui restent entièrement étrangères.
Et il ne juge pas, pas plus qu’il n’interprète ou ne cherche à expliquer. Dans une optique scientifique, en effet, il peut établir des liens entre les choses, souligner des corrélations entre les phénomènes, mais ne se risquera jamais à analyser ces relations. Mario se contentera de mettre à profit les connaissances dont il dispose pour observer, décrire et analyser froidement. Ainsi aura-t-il recours aux théories et aux outils collectés par le Dr Igor, qu’il appliquera ou utilisera tels quels. On peut lui soumettre des idées, qu’il étudiera à l’aune de leurs résultats, sans être aveuglé par des considérations qui n’ont pas lieu d’être. Pour lui, si ça marche, ça marche. Il n’a pas à voir plus loin. Si A se présente ou fonctionne “comme” B, alors A peut aussi bien être B (et donc A = B).
De fait, Mario peut être doté de modèles minimaux qui lui permettront de comparer ses expériences aux schémas qu’il aura en mémoire, ou aux règles qu’on lui aura inculquées sous forme de codes. En réalité, c’est peut-être un robot.
4. Lord Tesla : les idées d’un théoricien
C’est Tesla qui se chargera de proposer des explications aux phénomènes observés par Mario. Le Martien constate l’existence de relations entre les choses, relations qui sont soumises à l’analyse sagace du scientifique. Lui ne se contente pas d’appréhender êtres et choses en termes de boîtes noires recevant d’un côté toutes sortes de stimuli, et produisant de l’autre des actions et des comportements : il s’autorise à formuler des suppositions logiques sur les liens entre entrées et sorties, et sur le fonctionnement de ces mécanismes anonymes.
Pour ce faire, il lui faut émettre des idées et formuler des théories. Son cerveau bouillonnant est une machine à générer des possibles ; son imagination fertile n’a de cesse de proposer des opinions, fruit de constructions mentales sophistiquées. Amant des sciences, Lord Tesla est animé par la quête des lois de la nature ; ce qu’il désire avant tout, c’est comprendre le monde qui l’entoure. Esprit structuré, il voit autour de lui des correspondances, des formes, des structures et des modèles cachés (patterns).
Il est le savant – fou ? Il cogite, extrapole, et disjoncte parfois ; cependant, nul ne doit le brider dans ses réflexions. S’il aime la théorie, Tesla est conscient de ses limites, et de la nécessité de la pratique. Après tout, il ne peut fonder ses idées que sur ses propres conjectures. D’où l’intérêt de vérifier leur pertinence en mettant en place des protocoles de test adéquats. Car la connaissance ne peut progresser sans hypothèses, sans essais ni erreurs. Les certitudes se construisent sur la base de suppositions, que valide ou infirme l’expérimentation. Lord Tesla tentera donc de mettre son ego entre parenthèses, et de s’adjoindre les services du fidèle Mario pour l’observation impartiale des résultats de ses diverses tentatives. Guidé par ses intuitions, il sera bel et bien obligé de prendre parti pour avancer dans ses recherches, mais appréciera en toute objectivité les résultats de ses expériences. Il saura même reconnaître son ignorance ou son impuissance, et suspendre son jugement en l’absence de preuves concluantes.
Son extravagant laboratoire regorge d’instruments qu’il collectionne avidement ; tout à fait dans son élément au milieu des machines, sa bobine rayonne, comme traversée d’éclairs de génie. Précis et méthodique, Tesla peut passer des heures à détailler les points les plus obscurs de ses théories complexes, peaufiner les détails de ses procédés expérimentaux, ou bien mettre au point de nouveaux outils plus adaptés. Intellectuel brillant, il manie les concepts avec agilité, jonglant avec les idées, passant avec enthousiasme d’un sujet à l’autre. Son scepticisme légendaire se fonde sur un redoutable esprit critique. Il aime débattre les notions controversées et se plaira à changer de camp juste pour voir les choses sous un autre angle, en adoptant une autre perspective. D’ailleurs, il est aussi philosophe – son prénom n’est-il pas Diogène ?
5. Capitaine Hannibal : les stratégies d’un gagnant
S’il est dans ce groupe un mâle alpha, volontiers sauvage et dominateur, c’est bien Capitaine Hannibal. Il est guidé par un ensemble d’objectifs plutôt que par une liste de règles ou de principes. Il est le gagnant, celui qui choisit des défis à sa mesure, et se fait fort de les remporter. Visionnaire, il sait traduire en action toutes ses ambitions. Il veut “résoudre des problèmes”, c’est-à-dire atteindre des objectifs ou des états désirés. Infiniment constructif, il n’a pas de temps à perdre avec les obstacles qui jalonnent sa route. Les solutions, il les trouvera. Il est plein de ressources. Optimiste, positif et d’un enthousiasme communicatif, il met toute son énergie à produire et bâtir. Il veut des résultats. Si ce qu’il entreprend marche (et cela marchera), il capitalisera.
Fin stratège, fier meneur d’hommes, Hannibal adore qu’un plan se déroule sans accroc. Courageux, il sait prendre des risques et s’ouvrir à l’expérimentation, qu’il se fasse capitaine d’une expédition à dos de pachyderme, ou cannibale soucieux d’enrichir son expérience culinaire. Certains se le représentent comme un héros antique, digne de voir ses exploits figurer sur les plus vieilles céramiques ; d’autres pointeront sur lui leur doigt accusateur, criant au révolutionnaire, au terroriste, au communiste ! D’une discipline spartiate, lui ne fait pas de cinéma, ne juge pas, et ne déviera pas de sa route. Peu enclin à arrondir les angles, il ne craint pas de traverser la vase ou la fange, de s’avancer sur sol instable, sur un terrain mouvant comme les sables. Viser la lune, ça ne lui fait pas peur ; des sacrifices, s’il le faut, il en fera. Il en a déjà fait. Et toujours le poing levé.
D’un côté, Capitaine Hannibal commande à Dr Igor, Mario ou Lord Tesla des recherches sur les moyens de parvenir à ses fins. Il est friand de toutes les méthodes et techniques qui ne demandent qu’à être appliquées bêtement pour aboutir aux effets escomptés (homme d’action, la réflexion n’est pas son domaine). De l’autre, il s’assure que les connaissances acquises par Dr Igor, ou bien les théories développées par Lord Tesla, donnent bel et bien lieu à la production de résultats tangibles et d’outils exploitables. Plutôt que de laisser libre cours aux élucubrations abstraites de ses camarades, il veut garantir qu’il en ressorte quelque chose de concret, et cherchera toujours à déduire des solutions pertinentes pour résoudre des problèmes.
6. Loki : le mauvais esprit
Farfadet farceur, fieffé filou, Loki est un petit fripon. Il est le daimôn, le daemon, le démon. C’est un mauvais génie, pas un mauvais diable ; il n’est pas nécessairement malfaisant, mais il échappe à notre contrôle, mu par ses propres instincts. Il est toujours là, quelque part, prêt à surgir de sa boîte ; pur esprit, vaporeux et fantomatique, plus insaisissable que la fumée.
Son essence divine ne l’empêche pas d’être de la mauvaise graine. Il est notre part d’ombre, l’inconscient archaïque, primitif et reptilien, le dernier rire du pendu. Il laisse libre cours à ses pulsions, prêt à renverser sa soupe depuis sa chaise haute, détruire les châteaux de sable de ses petits camarades, ou arracher une à une les pattes d’une araignée. Il est joueur et n’a pas besoin de beaucoup pour s’amuser comme un enfant. Capricieux, on l’entendra juger et clamer que “ça se fait pas !” ou que “c’est comme ça !” On n’est pas obligé de le croire. Il est celui qui s’énerve, qui laisse s’exprimer sa colère. Il est trop émotif et spontané pour être honnête, trop naturel pour être vrai.
Il s’autorise à raconter des histoires, dans lesquelles il voit partout le mal, l’illusion et la manipulation. Sa mauvaise foi nous sidère ; le verre est toujours à moitié vide. Puisqu’il ne voit que ce qu’il veut voir. Cynique et gonflé d’orgueil, il trouvera toujours matière à critiquer, et n’hésitera pas à pousser les autres à la faute, pour conclure sournoisement sur un “que de la gueule !” rédhibitoire. Il use d’ironie pour se faire rire, et de bouffonnerie pour moquer les autres. Jamais à court de tours pendables à nous jouer, il est le roi des tricksters, le maître lutin au sourire mutin. Jaloux et envieux, peureux, paresseux et lâche, c’est un hypocrite notoire.
Loki n’hésitera pas à lancer des formules à l’emporte-pièce, qu’il s’agira ensuite d’analyser rigoureusement. Qui sait si de ses accusations acerbes ne peuvent éclore quelques vérités iconoclastes ? Le reste du temps, il mettra son grain de fiel dans nos discours aussi souvent qu’il le souhaitera ; s’exprimant beaucoup dans les titres et les légendes, par exemple, il introduira des pointes de sarcasme et d’ironie dans les exposés les plus sérieux.
Avec sa manière de jouer avec nos nerfs, finalement, c’est lui le plus manipulateur d’entre nous.
7. La Plume : le style du poète
Artiste aux innombrables talents, La Plume manie les lettres et les mots comme le corps et l’épée, la lyre et le pinceau. Il est esthète et synesthète ; il recherche la beauté, et ne voit autour de lui que des forêts de symboles. Original et créatif, il ne renie pas sa sensibilité. Il peut tomber amoureux, s’émouvoir et souffrir.
Lui-même s’autorise à provoquer des émotions, à créer des univers, à nous faire vivre des expériences. Un peu pirate, un peu corsaire, il met ses dons à profit pour faciliter la communication des messages que souhaitent transmettre les autres avatars. Charmeur et séducteur, La Plume caresse nos sentiments. S’il nous manipule et sait faire illusion, donc, c’est pour la bonne cause.
Par amour, La Plume apporte une délicate note sucrée à des descriptions trop arides. Une touche artistique, une pointe de légèreté, une once de douceur, qui rivalise avec la tendresse des anges. Pour être tout à fait honnête, “il” est peut-être “elle”.
En conclusion :
- Maître Lupin guide les efforts d’un ensemble d’avatars unis contre la manipulation
- Capitaine Hannibal traduit ses objectifs concrets en stratégies et moyens d’action pragmatiques
- Dr Igor, garant des savoirs acquis, accumule les connaissances, qu’il puise à toutes les sources, et met à disposition les outils d’analyse d’ores et déjà développés
- Mario le Martien observe froidement et utilise les outils recensés pour décrire des relations entre les choses
- Lord Tesla analyse les relations, élabore des théories et propose de nouvelles idées
- Loki distille son mauvais esprit dès qu’il le peut, mais ses affirmations cruelles peuvent nous offrir l’occasion d’approfondir nos réflexions
- La Plume, enfin, enrobe le tout d’élégance et de poésie