25 Sep 2016

Mens-moi, mens-moi, j’aime ça !

Publié à 23h15 par et sous Croyances et dogmes, Esprit critique, Scepticisme et zététique

Pardon. C’est ce que nous venons dire ici. Pardon. C’est ce que nous voulons demander. Pardon. À tous ceux qui se disent enquêteurs aux frontières du paranormal, “illuminés” incompris ou simples chercheurs de vérité. À tous ceux dont nous avons osé critiquer le travail, questionner la démarche, ausculter les théories. Ces individus dont nous doutions de la bonne foi, qu’ils soient mystiques, ésotériques, comploteux ou conspi… La vérité était ailleurs, et nous l’avons enfin compris. Cette vérité, elle est simple, elle est belle, elle est tout sauf cruelle, et nous voulons vous la dévoiler aujourd’hui.

(Version non ironique de cet article à retrouver ici puis  🙂 !)

En ce jour, nous écrivons ce texte pour implorer publiquement le pardon. Pour reconnaître ouvertement notre erreur. Admettre nos errances. Expier nos fautes.

Et, par là, obtenir la rédemption. En espérant au passage pouvoir nous aussi profiter de la manipulation.

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Pas tirer, pas tirer !

Nous tenons à présenter nos excuses.

À tous ceux, d’abord, qui affirment dire le vrai et proposer des faits qu’on ne peut réfuter : écrits, mesures, témoignages ou vidéos exclusives sans montage ni trucage… À tous ceux qui rejettent officiellement l’idée du mensonge et de la tricherie, et qui crachent à la gueule des importuns osant les en accuser, même lorsqu’il s’avère finalement que les accusations étaient fondées. Un GussDx, par exemple, si prompt à produire une vidéo d’excuse larmoyante une fois l’arnaque de l’un de ses reportages définitivement établie.

Nos excuses à tous ceux qui ont pu se sentir blessés, ensuite, de voir leur travail injustement pris à partie ici, indûment soumis à l’analyse et la critique. Comme s’ils étaient de vulgaires individus soumettant leurs propos au commentaire libre. Comme si l’on pouvait s’autoriser à discuter de leurs positions peu orthodoxes avec recul et perspective.

Pardon en particulier à Pooyard et Grimault, auteurs revendiqués de La Révélation des pyramides (on va rester sur cette désignation imprécise d’« auteurs », vu qu’on ne sait plus trop qui prétend avoir fait quoi dans le couple, désormais…).

Non pas que nous ayons finalement décidé d’adhérer à leurs interprétations hâtives, leurs hypothèses perchées et leur épistémologie que nous qualifierons a minima de, euh, « penchée » – hola non, restons sérieux, ça reste du grand n’importe quoi balancé très vite et très fort pour étouffer toute réflexion, avec moins d’éléments d’argumentation que de pouvoir de conviction…

Mais parce qu’ils ont tout compris. Ils avaient raison. Depuis le début. Ils ont toujours su. Ils ont toujours porté en eux la vérité, et ils le savaient.

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Dire vrai tue

Nous voulons présenter nos excuses, enfin, à ceux qui vivent des révélations et des idées absurdes des autres, ceux qui s’en repaissent et en font le commerce, parce que tant qu’on sait pas (et d’ailleurs même quand on sait), eh ben… on sait pas. Dans le bénéfice du doute, ce qui est bien, surtout, c’est le bénéfice.

Pardon, dès lors, à un bonhomme comme Bob qui, lui aussi, bien avant les autres, a su saisir l’air du temps. Humer ce climat de défiance généralisée, ce dénigrement compulsif de toute parole émanant d’une figure jugée “officielle”, cette complaisance victimaire qui nous fait ressasser l’idée qu’on ne nous dit pas tout, que c’est pas nous qu’on contrôle les choses, que les vrais savoirs ont été dissimulés il y a longtemps, etc.

Il a su mieux que les autres investir l’internet et racler les bas-fonds du web mystico-conspi pour nous dire « toute la vérité » (sic). Dans une France en souffrance, c’est exactement ce dont nous avions besoin : notre Alex Jones à nous. Le tenancier d’une plateforme qui nous offrirait non pas ce dont nous avons besoin, ce qui pourrait nous tirer vers le haut, mais ce vers quoi nous poussent nos faiblesses (lâcheté, paresse intellectuelle…). BTLV serait cet endroit où l’on lèverait le lièvre sur les complots fantasmés, les fausses révélations et autres délires paranoïaques de ceux qui ne savent plus à quel saint se vouer.

Pardonnez-nous l’offense de ne pas avoir compris ce que vous, vous aviez déjà compris.

Car la seule vérité, cette réalité de notre nature que tous ces génies ou chercheurs avaient entrevue avant nous, elle tient en peu de mots : nous ne méritons aucun respect.

Puisque, à chaque fois que le mensonge de l’un d’entre vous est éventé, à chaque fois que son comportement immoral est dévoilé, ou ses pratiques moins qu’irréprochables mises à jour, quelle est notre réaction spontanée à nous, public admiratif ? Eh bien, le déni, pardi ! Nous vous défendons, nous vous soutenons, nous minimisons la portée de la remise en question, nous nous disons que tout ne peut pas être vrai… On ne va quand même pas balancer le bébé mort avec l’eau du bain !

Ou bien, si vous travaillez en équipe, nous consentons à sacrifier la brebis la plus galeuse de la bande, nous la transformons en un bouc émissaire que nous chargeons du poids de tous les péchés, pour mieux nous ranger derrière l’agneau qui nous paraît le plus présentable, moutonniers que nous sommes… Tous les moyens sont bons pour continuer à nous berner !

Vous nous mentez ? Vous nous abreuvez sans honte de contre-vérités ? Mais… Mais… Nous n’attendons que ça ! Nous ne demandons que ça ! La foule veut ça ! Le cynisme est devenu roi. Vive Frank Underwood et tous ceux qui ne nous respectent pas !

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Une vérité saignante

Acculé par des détracteurs, vous nous faites une vidéo pour reconnaître une seule et unique erreur, et nous jurer la main sur le cœur que tout le reste de votre travail, par contre, est tout bon, tout bien, tout parfait, qu’il n’y a rien d’autre à jeter ? Mais nous vous croyons, voyons, pourquoi douter ? Vous venez de dire la vérité, c’est bien la preuve que vous savez le faire ! Vous avez un tel talent pour vous présenter comme la victime, jouer avec nos sentiments sous notre nez, nous arracher une petite larme sur votre condition d’opprimé, sans oublier d’agiter votre écuelle pour qu’on y mette quelque piécette…

Le mensonge ! L’arnaque. La manipulation… Nous ne méritons que ça ! Nous ne méritons pas la vérité. Nous ne nous respectons pas, alors, si nous-mêmes nous ne le faisons pas, pourquoi d’autres le feraient ?

Votre mépris nous honore.

Alors allez-y, mentez-nous. Mentez-nous encore. Mentez-nous toujours. Mentez-nous mieux ! La foule en délire en redemande !

Et si un esprit tatillon vient à faire la preuve de vos mensonges, de façon si accablante que plus personne ne peut décemment nier l’évidence, même vous… Accusez les autres de toutes vos erreurs (pourquoi pas votre public, même, qui en réclamait trop !), révélez-nous que vous saviez tout des charlataneries d’un partenaire depuis des années (contrairement à ce que laissaient entendre vos attaques à l’égard de ceux qui montraient vos erreurs, vos mensonges et vos omissions) mais que vous ne pouviez tout bêtement rien dire, rien confirmer.

Et ne manquez pas de vous victimiser davantage en nous racontant que, quand même, votre vie est bien difficile. Mettez beaucoup d’affect dans vos aveux, ne lésinez pas sur le pathos et les pleurnicheries, prenez l’air le plus désespéré pour exprimer vos déclarations contrites… #jesuiscosette

***COPYRIGHT UNKNOWN USE AT OWN RISK*** PIC FROM CATERS NEWS - (PICTURED: PUSS IN BOOTS) - A real-life Puss in Boots has been born with the Shrek favourites trademark giant eyes. Famous for his adorable face, the character voiced by Antonio Banderas never fails to inspire an Awwww. But Drogon the black-footed cat is no cartoon. The tiny kitten was born in April at Philadelphia Zoo, Pennsylvania, and at eight weeks old weighs just 27 ounces. SEE CATERS COPY.

Chat va bien se passer, t’inquiète

Nous serons toujours là pour vanter votre honneur, et louer le courage dont vous faites preuve en avouant vos mensonges passés. Oui. Le courage. Nous n’aurons aucune honte à employer ce mot. Il y a bien longtemps que nous en avons oublié le sens.

Peu importe que le vrai courage aurait consisté à ne pas mentir du tout depuis le début, peu importe que, à ce point, vous n’ayez plus d’autre choix que de lâcher ce que vous avez toujours voulu cacher, peu importe que votre cynisme transparaisse davantage que votre intégrité ou votre sincérité : nous serons là pour vous ériger en héros parce que, c’est bien connu, le (super)héros est celui qui ment effrontément pendant des années puis à la fin avoue qu’il a menti #jesuislancearmstrong

Nous ne méritons rien de plus que ça. Des Lance Armstrong et toute la clique des dopés professionnels comme sportifs de haut niveau, des Cahuzac et des Sarkozy comme responsables politiques, des Madoff en guise d’hommes d’affaires.

Et nous en voulons plus, toujours plus ! Nous voulons des Jacques Grimault, des Donald Trump et des Boris Johnson ! Des bonimenteurs aux perruques blondes, qui savent flatter nos bas instincts, et nous caresser dans le sens du poil (doré). Vive le gang des postiches ! Nous voulons des bons aryens dont la chevelure ment au moins autant que l’individu qu’elle vient couronner !

Le simple fait que vous ayez été capable d’avouer votre mensonge est bien la preuve qu’on peut vous faire confiance, non ? Alors, c’est que la confiance n’est pas rompue. On ne va rien vous demander de plus. On ne va pas renforcer nos contrôles ou nos exigences vis-à-vis de ce que vous dites. Pas besoin. On vous suivra où vous voudrez, on vous dit !

Et tant pis si, du coup, la prochaine fois qu’une entreprise ou un politicien avouera un mensonge, nos protestations ne pourront s’attirer que des ricanements, parce que cette tolérance au mensonge à géométrie variable nous aura fait perdre toute crédibilité… Le double standard, on aime ça (sinon on vous suivrait déjà pas dans vos délires). Les gens qui racontent des mensonges qu’on a envie de croire ont le droit de mentir. Les autres non. C’est aussi simple que ça. Voilà.

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On tient le bon bout !

Et donc, ça y est, moi aussi, je l’ai eue, ma révélation ! Cette vérité à laquelle je viens d’accéder explique tellement de choses. D’un coup, je comprends mieux la réélection systématique des Balkany, les sondages positifs pour un Trump ou l’autre Sarkozy…

J’ai vécu une longue traversée du désert… Parce que je devais prendre de la distance, pour me rendre compte que je m’étais fourvoyé ! Aucun intérêt à enseigner aux gens comment éviter de se faire manipuler, comme ce site s’en était donné l’objectif… Le plus malin depuis le début était en fait de les influencer pour en obtenir des faveurs, de l’argent et de la reconnaissance, voilà tout ! C’était si facile, comme le nez au milieu de la figure du sphinx… Sans doute pour ça qu’on ne l’avait pas vu.

Et maintenant que je me suis aplati devant vous comme ça… Enquêteurs alternatifs, détenteurs de vérité révélée ou simples chercheurs de vérité… Prenez-moi. Apprenez-moi. Je suis long à la détente, j’en aurai certes fait la démonstration, mais je peux m’amender, je le sais. Je sais qu’avec de la patience et des efforts, en perdant progressivement tout reste de bonne foi, moi aussi je peux apprendre et vous égaler.

Si l’on ne peut rien faire contre notre tendance à laisser nos croyances nous aveugler… Eh bien soit, je suis d’accord, je me range à cette position, autant en profiter. Moi aussi je veux voyager. Me faire payer des vacances en Égypte ou à l’île de Pâques – pardon, « dans des lieux très très mystérieux » – aux frais de la princesse ! Comment profite-t-on de la crédulité humaine ? J’ai tant à apprendre ! Les perspectives me semblent vastes, immenses, infinies. Que ne serai-je capable de faire quand je pourrai d’un mot commander le respect de croyants prêts à me soutenir béatement !

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Devenons des pros : menteurs et fiers de l’être !

Apprenez-moi ! Quel savant mélange d’appel à l’instinct, au rêve et à la pensée magique permet de générer cette suspension d’incrédulité qui amènera les gens à me croire et vider régulièrement leur portefeuille pour moi ? Comment réaliser des vidéos que personne n’aura envie de questionner, et qui amèneront les gens à croire en ce que je crois sans avoir besoin de le formuler explicitement ? Quelles phrases simplistes et quelles images chocs utiliser ? Sur quels biais jouer, à quelle méconnaissance et à quels préjugés faut-il en appeler ? Comment alterner entre mélodie planante et musique martiale ? À quel moment lancer une campagne de crowdfunding pour monter en gamme, et comment s’assurer de pouvoir en relancer une autre dans la foulée sans avoir rien produit, puis pourquoi pas encore une autre, sans jamais éveiller aucun soupçon ?

Quel est le bon niveau d’émotion à atteindre dans des aveux filmés ? Quelle corde sensible faut-il faire vibrer ? Faut-il parler de ses problèmes personnels, de sa famille, de ses finances ou de sa santé ?

Et comment se victimise-t-on suffisamment pour détourner l’attention du fait qu’on a soutenu pendant des années la personne qu’on accuse maintenant d’être un escroc ? Comment fait-on pour ne s’attirer aucune question quand, après avoir longtemps affirmé avoir entièrement vérifié le travail de quelqu’un, on révèle finalement qu’il comportait beaucoup trop de déclarations exagérées ?

Ce sont toutes ces choses que nous avons à apprendre car, si nous ne sommes pas capables de nous respecter nous-mêmes, et d’exiger en retour le respect des autres, il doit bien y avoir moyen de nous exploiter.

Auteurs : et

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